« Ce n'est pas que je ne t'aime pas, c'est juste que je n'aime personne... »
This is my story
Associale ♦ Bienveillante envers ces congénères ♦ Sang-chaud ♦ Protectrice ♦ Moqueuse ♦ Intelligente
Je soupirais pour la énième fois en regardant les bâtiments défiler sous mes yeux. J'avais quitté la forêt du Wyoming pour cette ville si trépignante et je ne voyais pas vraiment l'intérêt de tout ça. Ma mère, au volant, ouvrit la bouche, sans doute pour me faire remarquer que par chance il ne pleuvait pas, mais la referma tout aussi rapidement. Depuis qu'elle m'avait annoncé le déménagement, elle évitait soigneusement tout conflit avec moi en ne m'adressant la parole que pour me dire bonjour le matin. La tension était palpable et je sentais qu'elle se méfiait de moi. Avait-elle peur que je ne lui saute à la gorge ? Sans doute oui et peut-être que moi aussi j'avais peur que cela se produise. Ce qui pouvait expliquer que je préférais ne pas lui parler non plus.
Je savais qu'elle n'y était pour rien et qu'elle tentait simplement de faire de son mieux pour moi et pour ça, je m'empêchais de lui en vouloir. Mais elle savait également que je n'aimerais pas ma nouvelle vie et que j'étais trop rancunière de cette trop soudaine transformation. Elle le savait, et pourtant, rien n'y fit... Peut-être qu'elle voulait également partir pour des motifs personnels ? Peut-être qu'après avoir amassé tant d'argent en bossant comme une esclave au point même d'en oublier notre vie de famille, elle avait décidé de nous mettre au vert à l'étranger pour rattraper le temps perdu et oublier ces dix-sept années de stress ?
J'en soupirais à nouveau. Le hic dans tout ça c'était que j'allais radicalement changer de vie, parce qu'au fond, j'habiterais toujours dans une forêt, bien que celle-ci ne soit pas constituée de bois mais plutôt d'une vague humaine. Non, ce qui me faisait peur c'était surtout de rencontrer mes congénères ! Car depuis que j'étais officiellement louve, je n'avais muté que deux fois -première transformation comprise- et les deux fois, j'avais été tellement boostée par l'adrénaline que j'avais été obligée de courir une bonne heure pour me défouler et oublier la douleur de mes muscles encore vifs. Alors, si eux ne fonctionnaient pas de cette manière en ville -car je savais qu'il y en aurait- ? S'ils m'imposaient de me transformer sous certaines conditions, s'ils me bizutaient ? Ou pire encore, s'ils m'obligeaient à me mettre nue devant eux avant chaque transformation ?
Je me tournais vers ma mère, les larmes aux bords des yeux :
Maman, j'ai peur. J'veux pas y aller, rentrons à la maison...Elle gara la voiture le long d'un trottoire et me regarda de ses beaux yeux bruns. Jamais elle n'avait paru autant rassurante pour moi, et pourtant, elle se contentait simplement de me regarder. Elle posa alors sa main sur les miennes crispées sur mes jambes et entrepris de me détendre.
Je sais que tu as peur ma chérie, mais tu as besoin de vivre avec des gens qui te comprennent. Tu ne seras pas seule et si au bout d'un mois c'est vraiment trop dur, eh bien... Que penses-tu du Canada ? C'est cool le Canada non ?Je hochais la tête, bien que peu convaincue et fermais les yeux pour éviter de pleurer comme une chochotte, après quoi, je hochais de nouveau la tête, mais cette fois-ci avec plus de convictions :
D'accord maman...Satisfaite, elle me lâcha et reprit le volant, puis nous nous remirent en route. A peine dix minutes plus tard, alors que ma crise d'angoisse était passé, elle s'engagea pourtant dans un sentier. Avant même que je n'ai pu protester et lui demander une dernière fois de ne pas continuer, elle arrêta la voiture dans une ruelle plus étroite et me fixa droit dans les yeux :
Je n'ai rien acheté pour que nous mangions ce soir, tu veux bien aller faire un tour là et nous prendre quelque chose ? Si en plus tu trouves de quoi nous faire un petit-déjeuner pour demain ça serait super ! Tu n'auras qu'à me rejoindre à pied, longe cette route et retiens que nous habitons au 10 !Je fis signe que je comprenais de la tête et attrapais le porte monnaie qu'elle me tendait d'une main peu assurée, après quoi j'ouvris ma portière et quittais le véhicule avec une certaine appréhension. Je lui jetais un dernier regard avant qu'elle ne s'éloigne définitivement puis, je soufflais un bon coup pour me redonner courage, après quoi je rentrais dans ce qui ressemblait à un petit supermarché. Dedans, ça sentait bon les fruits et les légumes, en fait, ça sentait surtout très bon la pomme et je me léchais les lèvres avec appétits, j'avais bien envie d'une pomme ! Instinctivement et grâce à mon odorat, je laissais les odeurs les plus appétissantes me guider sans prendre compte de la vieille dame qui s'occupait de la caisse. En fait, comme son parfum semblait s'accorder avec celui du supermarché, je dû la voir de mes yeux pour m'assurer qu'elle était là.
Aussi, lorsque la clochette du magasin tinta et qu'une nouvelle odeur arriva brusquement à mes narines, je ne pus m'empêcher de froncer les sourcils. Quel humain ordinaire pouvait sentir aussi bon ?
Ne prenant même pas la peine de jeter au coup d'oeil, je décidais de m'éclipser dans un rayon où on me laisserait tranquille. Allez savoir pourquoi, ce rayon était celui des alcools...